Faire du cross avec un vélo de ville ? Challenge accepted ! |PV Rafaël|

Quand Noah avait une idée en tête, il ne l’avait pas ailleurs. Et son côté têtu faisait que même si ça semblait compromis pour n’importe qui, lui ne voulait tout simplement pas abandonner et aller au bout des choses. Il y avait de ça quelques jours, il s’était juré d’aller faire un peu de vélo en forêt, après avoir repéré une piste de cross où il pourrait s’amuser avec son VTT. Ça faisait déjà une semaine qu’il se faisait une joie d’y aller, sauf que l’univers semblait en avoir décidé autrement...

La veille du jour J, Noah, comme à son habitude, s’était rendu à la caserne en vélo, son unique moyen de transport étant donné qu’il n’avait toujours pas passé son permis voiture. Et s’il connaissait le trajet par cœur, qu’il aurait pu y aller les yeux fermés, il ne fallait pas oublier qu’il n’était pas le seul sur la route ! Résultat, pile avant d’arriver à la caserne, un autre vélo avait déboulé à toute vitesse à un croisement sans prendre la peine de s’arrêter, grillant ainsi la priorité à Noah qui ne l’avait vu qu’au dernier moment. L’Américain avait freiné de toutes ses forces pour éviter la collision, et il avait fini par faire un magnifique soleil par-dessus son vélo. Celui-ci glissa plus loin sur la route et… se fit à moitié écraser par une voiture. Noah avait regardé la scène avec un air choqué. Heureusement, les dégâts n’étaient que matériels. La roue arrière de son vélo était bonne à changer, mais le châssis semblait intact. Il n’aurait qu’à le déposer à un garage pour le retaper ! Lui, de son côté, il se retrouvait avec des bleus et des éraflures par-ci par-là, qui lui avaient valu de devoir jouer de son contrôle sur son pouvoir pour éviter de suinter du jus de licorne devant les badauds qui s’étaient approchés de lui pour s’assurer que tout allait bien. Noah dut donc terminer le trajet jusqu’à la caserne à pied, le cadavre de son vélo sur l’épaule. Aussitôt arrivé, il s’empressa de filer à l’infirmerie pour désinfecter tout ça et, surtout, se coller des pansements et des bandages un peu partout pour éviter d’avoir à contrôler davantage son pouvoir. S’il le faisait trop longtemps, il finirait par avoir une grosse migraine et… la journée de boulot venait tout juste de commencer, alors il ne pouvait pas se le permettre !

Quoi qu’il en soit, après cette mésaventure, n’importe quelle personne censée aurait reporté sa petite balade à vélo. Mais non, Noah n’était pas comme ça. Il avait déposé son VTT dans un garage à la sortie de son boulot la veille, puis il était passé chez ses parents pour le dîner. Forcément, sa mère surprotectrice lui avait passé un sacré savon en voyant l’état de son précieux bébé, mais elle avait fini sa colère en le couvrant de bisous et de câlins, avant de lui préparer son plat préféré. L’Américain avait beau être adulte et avoir pris son indépendance, il devait avouer qu’il adorait se faire chouchouter de la sorte par sa mère de temps en temps. Après le dîner, il était donc entré dans de difficiles négociations avec ses parents afin de savoir s’il ne pouvait pas leur emprunter un vélo pour sa balade prévue le lendemain. Son père fut catégorique : il avait bousillé son vélo, il attendrait que celui-ci soit réparé. Hors de question qu’il abîme son vélo à lui ! Sa mère avait d’abord dit non, lui rappelant qu’il venait tout juste d’avoir un accident qui aurait pu être bien plus grave mais… devant l’air de chien battu de son fils chéri, elle finit par céder. Ce fut donc au guidon du magnifique vélo de ville de sa mère que Noah quitta la maison familiale pour retourner à son appartement. Son allure sur ce vélo était vraiment risible : un mec super canon et un peu carré, sur un vélo tout fin d’une couleur rose, avec un petit panier décoré à l’avant. Y’avait plus viril ! Mais Noah s’en foutait : du moment qu’il pouvait faire sa balade à vélo, peu importait sa dégaine !

Le matin-même de sa balade donc, Noah s’était dépêché de se lever et de se préparer, pressé d’aller se dépenser en forêt. Il faisait beau et un peu chaud, alors il opta pour son short de basket lui descendant sous les genoux, ainsi que pour une veste de sport assez près du corps qu’il avait mise par-dessus un t-shirt. Ses baskets dans les pieds, ses pansements changés, Noah se rendit donc jusqu’à son petit garage pour en sortir le vélo de sa mère. Il ne put s’empêcher de pouffer en s’imaginant son allure là-dessus, mais il grimpa quand même sur la selle pour filer en direction de la forêt. Le vent qui fouettait son visage était tellement agréable ! Noah aimait cette impression de vitesse et de liberté que lui procurait le vélo sur la route !

Bien vite, il atteignit la forêt au pied du volcan. Il ralentit pour ne pas déranger les gens qui faisaient leur footing sur le sentier principal, puis il bifurqua afin de retrouver sa piste de cross. C’était un sentier balisé réservé à la pratique du VTT, alors il pourrait y aller à fond ! Sauf que bon, avec un vélo de ce genre aux roues si fines… Ce n’était quand même pas aussi pratique ! Noah riait comme un gosse en descendant les nombreuses bosses, en prenant les virages serrés, jusqu’à se ramasser en beauté en appréhendant un peu mal l’un des virages en épingle du parcours. Les fesses sur le sol, le vélo à moitié sur lui, l’Américain ne s’était pas fait mal et continuait à avoir un immense sourire sur les lèvres. Sa chute avait eu lieu non loin du sentier réservé aux promeneurs et coureurs, nul doute que beaucoup avaient dû le regarder descendre sur son petit vélo de ville en guettant le moment où il se gamellerait !

Elle avait prévu quoi aujourd'hui ? Rafaël ne s'en rappelait déjà plus. Il faut dire que depuis son emménagement il y a peu ici, elle avait passé son temps à courir partout. Toujours un truc à faire ici, des papiers à remplir là, des meubles à installer dans ce coin.. HA OUI ! C'était ça... aujourd'hui elle devait monter le canapé. La notice indiquait bien qu'il fallait être deux pour monter le dit canapé. Mais la notice pouvait aller se faire voir ! C'était pas ça qui allait l'impressionner ! Et de toute façon c'était pas comme si elle avait vraiment le choix... Elle n'avait pas vraiment eu le temps de rencontrer des gens autres que ces nouveaux collègues. Elle avait bien envisagé de leur demander, mais elle avait déjà dû passer toute la semaine à leur demander ci ou ça et elle n'aimait pas trop... elle n'aimait pas avoir l'impression d'être un boulet. Certes, c'était normal qu'elle ne sache pas où étaient les choses, qu'elle ait besoin de temps pour se réadapter parce que certaines procédures étaient différentes, et puis elle était encore officiellement en formation. Mais aller carrément leur demander de l'aide pour monter les meubles, ça c'était pas question encore !

Alors ce matin, c'était elle contre le canapé de chez Ikea ! Et de toute évidence, le canapé n'y mettait absolument pas du sien... du tout ! Déjà il était fourni avec une notice pas claire du tout, qui passait son temps à répéter comment les deux personnes devaient se positionner l'une et l'autre, gnagnagna la notice ! Mais en plus effectivement, les différents éléments étaient peu maniables quand on était seule... Rafaël ne s'avoua pas vaincue pour autant ! Avec un peu d'acharnement, le canapé commençait à prendre forme. Mais c'était tellement fatigant ! Et PÉNIBLE ! En plus il faisait beaucoup dehors. Alors est-ce qu'elle allait vraiment passer son samedi sur ce maudit canapé ?? HORS DE QUESTION. Foi de Rafaël !

Abandonnant les différentes pièces sur place, elle s'empressa de remonter à sa chambre pour se changer rapidement, pantalon de yoga, débardeur bleu et chaussures de sport. Elle attrapa rapidement un petit sac à dos dans lequel elle mit une bouteille d'eau et quelques gâteaux. Et elle était partie !

C'était un peu dur pour elle de s'installer ici parce que c'était la première fois de sa vie qu'elle vivait seule. Elle avait du mal à se l'avouer, mais elle ne le vivait pas aussi bien qu'elle l'aurait voulu. Elle se sentait souvent triste et nostalgique. Peut-être qu'elle aurait dû choisir de vivre en colocation, même avec un inconnu... peut-être que ça aurait été plus facile... et en même temps, elle avait eu un tel coup de coeur pour cette petite maison. Elle avait eu un coup de chance pour le loyer, et la maison était à deux pas de l'agrumeraie, des citronniers, et de toute la forêt. Un cadre de vie absolument parfait ! Dès les premiers signes de coups de blues, elle prenait ses baskets et partaient courir dans un coin ou un autre de la forêt. Si bien qu'elle passait la moitié de son temps à la caserne, et une partie non négligeable du temps restant dans la forêt. Sans doute la raison pour laquelle ce maudit canapé gisait toujours en pièces détachées au milieu du salon. Mais tant pis !

Aujourd'hui, Rafaël tente un nouveau sentier, courant tranquillement, à son rythme, sa longue chevelure lui battant le dos. Le coin est pas mal calme et ombragé. La forêt est magnifique ! Elle court tranquillement quand elle entend un drôle de bruit sur sa droite. Un gars vient de faire un soleil sur son vélo... attends, est-ce qu'il utilisait un vélo de ville ??? Elle s'approche, histoire de voir si le mec va bien, s'il ne s'est pas cogné la tête ou un truc du genre.

"Vous allez bien ?"

Arrivée plus près, elle le reconnaît : c'est un collègue ! Par contre, impossible de se souvenir son nom... trop de gens d'un coup et elle n'a pas eu beaucoup l'occasion de le croiser pour le moment... Enfin, il a l'air de sourire jusqu'aux oreilles. Alors soit il ne s'est pas fait mal du tout, soit il s'est vraiment cogné la tête en tombant. Les mains sur les hanches, elle sourit, amusée par la situation.

"Je te fais l'interrogatoire complet en mode tu sais quel jour on est et qui est président ou ça ira ?"

Noah venait de se rétamer en beauté, mais il continuait à sourire. C’était juste une petite gamelle, rien de bien grave à première vue. Surtout que bon… Il s’était un peu attendu à ne pas pouvoir gérer aussi bien que les autres, qui dévalaient la piste sur la selle de vrais VTT, quand lui se trimballait avec le vélo de ville de sa mère.

« Merde ! Le vélo ! »

Parce que oui, le vélo était plus important que lui. S’il finissait par l’abîmer et qu’il le ramenait en mauvais état chez ses parents… Son père allait lui passer un sacré savon !

Noah allait s’enquérir de l’état de son fidèle destrier quand une ombre lui cacha un peu le soleil. L’Américain releva les yeux vers la personne qui se tenait devant lui et lui demandait si tout allait bien. Noah s’empressa d’afficher de nouveau son grand sourire, hochant la tête, avant de tiquer et de plisser les yeux. Cette chevelure verte… C’était tellement peu courant qu’il ne pouvait que s’en souvenir !

« Ah ! Rafaël, c’est ça ? Tu te souviens pas de moi ? On bosse ensemble à la caserne, j’m’appelle Noah ! »

Elle venait juste d’arriver alors elle ne le remettait peut-être pas ! En tout cas, c’était plutôt marrant de croiser une de ses collègues ici ! Bon, il aurait préféré se montrer sous un meilleur jour hors caserne devant leur toute nouvelle recrue mais… La jeune femme finirait bien vite par se rendre compte que Noah était du genre clown de service, même au boulot.

« En tout cas, j’pense qu’on peut se passer de l’interrogatoire complet ! T’inquiètes pas, j’crois que ça va. »

Noah lui offrit un nouveau grand sourire, poussant le vélo pour enfin réussir à se relever. Juste par précaution, il en profita pour exercer son contrôle sur son pouvoir. S’il se foutait d’avoir fait une chute aussi ridicule devant sa collègue, hors de question qu’elle découvre son pouvoir !

Il regarda ses mains, ses genoux et fit un bref état des lieux de son corps en gigotant un peu dans tous les sens.

« Bon… Rien de cassé, heureusement que j’suis tombé sur de la terre ! En tout cas, merci d’être venue pour voir si tout allait bien, c’est gentil ! T’étais en train de faire un footing ? »

Puisqu’ils n’avaient jamais eu l’occasion de discuter ensemble… C’était un peu l’occasion, non ?

« Tu connais bien les environs du coup ? J’ai cru entendre que tu venais juste d’emménager alors… Bah si jamais t’as besoin, ça fait plusieurs années que je vis à Banchisa, donc je peux te servir de guide pour te montrer des endroits sympas ! »

Bon, c’était pas tout ça, mais…

« Ah ! Le vélo de ma mère ! »

Noah s’empressa de le relever et… Son teint passa au livide en voyant la tronche du panier avant.

« Oh, oh… J’vais me faire défoncer… »

Elle fût un peu surprise de s'entendre appeler par son prénom alors qu'à part ses collègues elle ne connaissait encore personne... et capta bien vite qu'il s'agissait justement d'un collègue ! Faut dire que bon, là où elle était la nouvelle aux cheveux verts, ce qui la rendait facilement repérable, lui était un mec parmi tout un tas d'autres à la caserne... Mais d'entendre sa voix lui rafraîchit rapidement et efficacement la mémoire.

"Ha si, maintenant que tu le dis ! Excuse moi je t'avais pas reconnu sans ton uniforme et emmêlé dans un vélo pas adapté au terrain !"

C'était une petite pic amicale. Peut-être que c'était un peu tôt pour ça mais bon, Rafaël ne s'était pas trop posée la question... et puis lui-même était le premier à être mort de rire devant la situation ! Puis bon, ça faisait du bien d'avoir quelqu'un qui vous parlait amicalement en dehors du boulot, alors elle n'avait pas résisté à l'envie de plaisanter avec son collègue, au risque de tomber à côté de la plaque... Elle lève les mains en l'air en signe de reddition, et toujours en plaisantant.

"D'accord c'est toi le boss ! Mais faudra signer une décharge de sortie contre avis médical ! Mais j'ai de l'eau si jamais t'en as envie, ou besoin."

De toute façon, à première vue il allait bien, et puis c'était un grand garçon, il s'en rendrait bien compte si y avait un problème ! Ceci dit, il n'avait pas l'air si sûr de lui vu comment il était en train de s'inspecter sous toutes les coutures. Raf le laissa faire. Dans tous les cas il risquait quoi ? Une égratignure ? S'il s'était tordu ou cassé quelque chose il s'en serait déjà rendu compte.

"Oui j'habite pas loin et je cherchais une excuse pour arrêter ce que j'étais en train de faire. Alors je suis partie courir ! Ça marche vachement bien. Je recommande à 100%. En plus si des gens tombent à vélo tu peux même te faire croire que c'était pas une excuse mais bien une nécessité."

De son point de vue, aller courir était toujours une bonne excuse pour tout. Aller courir c'était toujours mieux que n'importe quelle corvée. Aller courir, c'était mieux que absolument tout, c'était pas bien compliqué ! Elle faisait en sorte de courir un peu tous les jours et c'était toujours son moment préféré de la journée, son moment à elle, un moment que rien ne pouvait abimer. Pas même un collègue gamelé à vélo. En plus courir c'était une bonne manière de découvrir le coin, mais après tout, ça pouvait être sympa aussi de faire guider !

"Ha bah écoute, ça serait avec plaisir ! J'ai pas trop eu le temps d'aller partout avec tout le bordel pour l'installation... je maîtrise parfaitement le trajet entre la maison, la caserne et les courses. Et la forêt. Enfin certains coins. J'ai plus traîné du côté de l'agruemeraie. Donc si t'as des coins à me faire découvrir, je suis complètement preneuse !"

En plus Noah avait l'air plutôt sympa et ça faisait vraiment du bien de plaisanter avec quelqu'un avec autant de facilité. C'était rafraîchissant ! Après s'être inspecté lui, c'était l'heure de l'inspection du vélo. Et pour le coup, il avait pas l'air super heureux du résultat. De son point de vue le vélo n'avait pas grand chose de grave, juste le panier, mais pour le reste, il avait l'air d'être encore pas mal capable de rouler. Ça lui paraissait donc pas trop grave... mais après peut-être sa mère y tenait particulièrement ? En même temps si c'était le cas quel idée de venir faire le malin dans un sentier de cross avec un vélo de ville ! C'était un peu crétin... Mais au lieu de se moquer, parce qu'après tout elle aura parfaitement pu faire le même genre d'idiotie, elle eût une idée de génie.

"Hey ! J'habite vraiment à deux pas et j'ai tout ce qu'il faut pour réparer un vélo. Petit panier choupitrognon compris. En échange... en échange tu m'aides à finir de monter ce foutu canapé ikea !"

Elle avait l'air aussi déterminée qu'embêtée par cette histoire de canapé ! Surtout qu'elle se sentait un peu bête de lui demander ça. Mais bon, elle venait de le voir se planter à vélo comme une patate alors comme ça, ils seraient quittes !

Noah n’avait pu s’empêcher de rire en entendant la pique de Rafaël. Lui, se vexer ? Il fallait vraiment y aller pour que ce soit le cas ! Le seul sujet sur lequel il ne plaisantait pas du tout, c’était son pouvoir qui le complexait énormément. Mais à part ça, l’Américain pouvait rire d’à peu près tout, surtout de lui. Et puis la jeune femme avait raison de souligner qu’il s’était lancé sur cette piste de cross avec un vélo pas du tout adapté.
 
« Haha, bien envoyé ! En tout cas, si t’as un peu d’eau, j’suis preneur. J’t’avoue que j’suis un peu parti rapidement de chez moi avant de venir ici et j’ai oublié de prendre de quoi boire et manger… »
 
Il avait été tellement pressé de dévaler cette piste qu’il s’était un peu trop précipité pour sortir de chez lui… Heureusement qu’il était tombé dans le champ de vision de Rafaël au final ! Il aurait été obligé de rentrer bien plus tôt de sa sortie sinon, afin de ne pas mourir de faim ou de soif !
 
À la suite des mots de la jeune femme, Noah se mit de nouveau à rire.
 
« Je comprends parfaitement ! J’ai un peu tendance à faire pareil, mais avec le basket ! En tout cas, sois rassurée, c’était clairement une nécessité ! Qui sait ce qui aurait pu se passer si tu n’étais pas venue me sauver ! Peut-être que le destin aurait voulu que je me fasse vraiment super mal en tombant ! Enfin, ce qui est sûr, c’est que j’suis content d’être « tombé » sur toi. »
 
Pour quelqu’un comme Noah qui avait tendance à fuir la solitude, c’était toujours une bonne chose de pouvoir discuter et être en présence d’autres personnes. En tout cas, ce fut avec un grand sourire et un vif hochement de tête que l’Américain confirma à sa collègue qu’il lui ferait découvrir avec plaisir autant de coins sympas qu’elle le voudrait.
 
Enfin, avant de penser à leurs futures aventures, il était quand même nécessaire de se concentrer sur le moment présent et… le sale état dans lequel se trouvait le panier du vélo de sa mère. Noah, qui avait pourtant le teint hâlé, avait réussi à pâlir en s’imaginant le savon que son père allait lui passer s’il lui ramenait le vélo de sa mère dans cet état…
 
Et, soudainement, comme si Rafaël avait lu dans ses pensées, elle lui proposa un échange de bons procédés : elle l’aidait à retaper son panier de vélo et lui, en contrepartie, il s’engageait à l’aider à monter son canapé Ikea. Surpris par cette proposition, Noah fixa sa collègue avec des yeux ronds, avant de laisser place à une mine pleine de reconnaissance.
 
« Rafaël… Tout ce que tu veux ! Je peux t’aider à monter autant de canapés ou autres meubles Ikea que tu veux si tu m’aides à remettre ce panier en état ! »
 
Noah s’était rapproché de Rafaël et avait posé ses mains sur les épaules de la jeune femme, la fixant avec un air presque désespéré en attendant sa réponse. Soupirant ensuite doucement, il finit par lâcher la jeune femme et se frotter la nuque avec une moue gênée, son regard fuyant celui de son interlocutrice.
 
« En fait, c’était une idée un peu débile, je le sais bien mais tu vois… J’suis passé par là y’a pas longtemps et j’avais TELLEMENT envie de tester cette piste de cross ! J’me faisais une joie de la dévaler avec mon VTT, mais j’ai eu un accident hier en allant au boulot. Bon, rien de grave, j’ai juste eu quelques égratignures, mais mon vélo a pris cher et j’ai dû l’emmener au garage. Et comme j’avais prévu de venir ici aujourd’hui bah… ça me faisait chier de changer de programme alors j’ai été faire les yeux doux à mes parents pour qu’ils me prêtent un des leurs. J’t’avoue que j’aurais préféré que mon père me prête le sien mais comme je venais de « tuer » mon propre vélo, il a pas voulu… Donc bah… J’ai pas eu le choix que de me rabattre sur celui de ma mère et bah… C’était bien hein ! Franchement, si y’avait pas eu ce foutu virage en épingle, j’aurais peut-être pu arriver jusqu’en bas ! »
 
Quel moulin à paroles… Rafaël n’avait rien demandé en plus, mais Noah avait absolument tenu à lui expliquer toute la situation pour qu’elle puisse comprendre à quel point il était SUPER important pour lui de réparer ce panier.
 
L’Américain finit par se pencher pour redresser son vélo. Chose faite, il plissa un peu les yeux en fixant Rafaël.
 
« Mais attends… T’as genre des talents de mécanicienne ? Comment on va s’en occuper de ce panier ? Nan, au pire, tu pourrais même faire de la magie que ça serait pas du tout un problème, je dois juste faire en sorte que ma mère n’y voit que du feu ! Et, de toute façon, avant ça… J’crois qu’il y a un canapé qui nous attend. Alors ? T’habites par où ? J’te suis ! »

Raf attrapa la bouteille d'eau dans son sac pour la tendre à Noah en souriant. Elle avait du mal à se retenir d'éclater de rire, mais un sourire hilare traversait son visage.

"Donc si je comprends bien, on est tous les deux venus sur un coup de tête, sauf que moi j'ai prévu de quoi ne pas mourir déshydratée ou affamée alors que tu es venu avec un vélo pas adapté. T'as raison, il était essentiel que je vienne à ta rescousse ! Un drame aurait pu se produire !"

En vrai, Noah aurait sans doute pu s'en tirer tout seul. Du peu qu'elle l'avait vu au boulot, c'était quand même quelqu'un de plutôt débrouillard. Après, ça ne protégeait pas toujours de tout, et un accident ça arrivait vite. Tu en avais vu des grands durs partir faire les malins dans les montagnes par chez toi, et on les ramenait tout cassés après coup ! Y avait plus qu'à espérer pour Noah qu'il était quand même un peu plus malin qu'un touriste lambda dans la campagne italienne ! Rebondissant sur les dires de son collègue, elle surenchérit.

"Ravie que tu sois tombé tout court alors ! Ça fait plaisir d'avoir l'occasion de discuter."

Puis bon, c'était quand même sympa de pouvoir discuter. Vraiment, vivre toute seule, c'était pas son fort... c'était pas dit qu'avant peu elle cherche à se mettre en colocation... et en même temps elle avait eu tellement de chance en trouvant cette petite maison pile à côté de l'agrumeraie ! De quoi l'aider à supporter d'avoir quitté tout ce qu'elle connaissait. Mais quand même... la solitude... c'était pas ce qu'elle préférait... mais fierté oblige, elle n'avait pas spécialement envie de trop lui faire savoir non plus ! Raf avait horreur qu'on la prenne pour une gamine, depuis le temps qu'elle participait aux tâches de l'auberge, qu'elle devait faire une heure de route pour l'école ou le boulot, elle n'avait aucune envie qu'on la prenne pour une geignarde... l'équilibre était donc difficile à trouver ! Du coup, un échange de bons procédés, ça pouvait être une bonne solution !

"Bah si tu veux y a la bibliothèque après... mais c'est moins urgent que le canapé !"

Puis pour le coup, elle aurait vraiment l'impression d'abuser ! D'autant que la bibliothèque, elle était à peu près sûre qu'elle pouvait y arriver toute seule ! Alors que le canapé... c'était maintenant une certitude, la notice avait sans doute raison. Maudite notice ! Mais aussi bien la notice du canapé que celle de la bibliothèque furent chassées de son esprit lorsque Noah mit solennellement les mains sur ses épaules pour lui exposer toute la situation. Rafaël ne savait pas trop s'il fallait rire ou plutôt afficher un air compatissant. Pourquoi il lui racontait tout ça d'un coup ??? En même temps, elle avait l'habitude d'écouter les histoires des gens... sauf que normalement c'étaient les petits vieux du village ! Et en même temps, elle aimait bien cette ambiance de conspiration enfantine. Elle prit donc un air on ne peut plus sérieux pour lui répondre.

"Dans ce cas on va s'assurer que tes parents ne sachent jamais que tu t'es vautré comme une patate sur le vélo de ta mère ! Je suis sûre qu'ils vont y voir que du feu ! Foi de Rafaël !"

C'était quand même pas un petit panier de vélo qui allait la mettre en échec. Déjà que le canapé ikea y avait réussi... alors s'il fallait y ajouter un panier de vélo de ville à la con, ça serait définitivement une journée de merde ! Elle attendit qu'il récupère son vélo et ouvrit la marche vers chez elle, dix petites minutes et ils y seraient !

"J'habite juste à côté de l'agruemeraie, en même pas dix minutes on y sera. Par contre je fais pas de magie, enfin on peut essayer si tu veux mais mon livre de sort doit encore être dans les cartons donc on serait obligé de monter tous les meubles puis de ranger le contenu des cartons pour enfin le trouver ! Et ensuite il faudrait sans doute sacrifier un truc... qu'il faudrait trouver parce que j'ai pas encore racheter de Trucs à Sacrifier depuis que je suis arrivée sur l'île ! Ouai non, si tu veux mon avis, on ferait mieux d'utiliser ma trousse à outils..."

Ça, c'était sans doute le premier truc qu'elle avait sorti des cartons... avec sa paire de baskets pour la course à pieds !

"Mes parents gèrent une auberge et une agruemeraie en plein milieu de la campagne dans le sud de l'Italie. Y a toujours des trucs à réparer. Y avait pas tout dans le patelin à côté et la grande ville était à presque une heure de route. Donc bah tout le monde apprend un peu à réparer tout et n'importe quoi. Surtout n'importe quoi si tu veux mon avis !"

Papotant et marchant, ils arrivèrent comme elle l'avait dit bien vite devant chez elle.

"Tu peux poser ton vélo devant ! Je vais chercher la caisse à outils ! Enfin si tu veux boire ou manger quelque chose tu peux me suivre."

Elle fit une grimace en rentrant et constatant que la moitié de canapé qu'elle avait déjà réussi à assembler gisait toujours là, toujours simplement moitié de canapé, tandis que le reste des pièces s'étalaient partout autour en bordel. Dans tous les coins, les quelques cartons contenant encore ses affaires, livres et vaisselles, s'entassaient encore. Malgré tout, la petite maison était assez lumineuse, c'était pour ça qu'elle l'aimait bien. Elle cria par dessus son épaule :

"Je peux faire du café si tu veux !"

Noah attrapa avec un sourire la bouteille d’eau que Rafaël lui tendait, avant de se mettre à rire à sa remarque. Ouais, non, franchement, il avait fait n’importe quoi en venant ici sans prendre son habituel sac à dos et, qui plus est, avec un vélo pas du tout adapté à cette piste de cross ! La jeune femme avait raison : heureusement qu’elle était venue à la rescousse de Noah !

Quoi qu’il en soit, après avoir un peu échangé et s’être pas mal amusés de cette situation mine de rien assez improbable, les deux pompiers abordèrent un sujet bien plus important : un échange de bons procédés ! Noah pourrait repartir avec un vélo qui ne donnerait pas l’impression d’avoir été maltraité sur une piste de cross, et Rafaël aurait la chance d’avoir une bonne partie de ses meubles montés dans sa nouvelle petite maison, à commencer par son canapé ! D’ailleurs, à l’évocation de la bibliothèque, l’Américain se mit à rire.

« Moins urgent ? Faut jamais sous-estimer l’utilité d’une bibliothèque, même si t’y ranges pas de livres ! Enfin, je dois avouer qu’un canapé, c’est quand même un poil plus important… Rassure-moi, c’est pas un clic-clac, hein ? C’est super chiant à monter ces trucs-là ! Et ça te défonce le dos aussi ! J’dis ça pour toi, mais dors surtout pas sur ton canapé si t’as l’occasion d’avoir un lit, foi de Noah ! Enfin, en tout cas, aucun souci pour la bibliothèque, j’te filerai un coup de main si on a le temps après le canapé ! »

Petite fierté oblige, l’Américain avait tenu à se débrouiller sans l’aide de ses parents une fois plusieurs salaires tombés. Il avait donc vécu le début de sa vie active dans un appartement microscopique en dormant sur un clic-clac. Et après avoir réussi à se faire super mal au dos, il avait finalement craqué et demandé un peu d’aide à ses parents. Maintenant, il vivait dans un appartement suffisamment spacieux pour lui tout seul, avec une chambre et un vrai lit !

Et, finalement, Noah avait décidé d’expliquer toute la situation à la jeune femme, histoire qu’elle comprenne bien l’importance que revêtait la réparation de ce foutu panier. L’Américain hocha vivement la tête aux mots de Rafaël, l’air très solennel.

« Parfait, je m’en remets à toi Rafaël ! Ma survie en dépend ! »

Il exagérait, mais les savons de son père avaient de quoi vous faire passer l’envie de faire le malin. Et si sa mère décidait de lui infliger une petite punition elle aussi et qu’elle le privait des restes qu’elle avait l’habitude de lui céder… Non, vraiment, Noah comptait sur Rafaël pour l’aider à réparer ce fichu panier !

Une fois levé, avec les mains sur son guidon, Noah entreprit de suivre Rafaël jusqu’à chez elle, marchant entre sa collègue et son vélo. À ses mots, l’Américain ne put d’ailleurs pas s’empêcher de rire. Il l’aimait beaucoup cette nouvelle recrue ! Ils allaient en faire baver à leurs collègues s’ils décidaient de monter un bon duo ensemble ! Déjà que Noah, seul, pouvait être une vraie plaie (même s’il faisait super bien son boulot), alors là… Les autres allaient finir par s’en mordre les doigts avec un binôme de cette trempe !

« Haha, pas de souci, on va se débrouiller sans pour cette fois ! D’ailleurs, tu les achètes dans quel genre de boutiques tes trucs à sacrifier ? Nan parce que bon… J’imagine que ça se trouve pas en grande surface ! T’imagines si tu pouvais en trouver entre le rayon crémerie et celui pour les bébés ? »

Le chemin se fit dans la même bonne ambiance que depuis leur rencontre, Noah ne pouvant plus décoller le sourire qui étirait ses lèvres. Non, vraiment, il adorait Rafaël, c’était décidé !

« Ah, c’est cool ça ! C’est pour ça que t’as voulu trouver un logement près de l’agrumeraie de Banchisa ? Ça t’évite d’être trop dépaysée au moins ! Et ça devait être super sympa de vivre dans un petit village aussi ! T’as des frères et sœurs ? »

Ils arrivèrent finalement à destination et Noah appuya son pied sur la béquille pour la déplier, histoire que le vélo puisse tenir debout le temps qu’ils prennent ce fameux café à l’intérieur. L’Américain laissa son regard azur détailler avec un sourire l’extérieur de la bâtisse, avant d’entrer à son tour. Et inutile de dire qu’il ne s’était vraiment pas attendu à ce que ce soit autant Bagdad chez Rafaël !

« WOW ! On dirait un champ de bataille ! C’est ça le fameux canapé ? Comment ça se fait qu’il ait cette tronche ? »

Noah resta interdit quelques secondes à fixer la moitié de canapé avant de pouffer.

« Bon, j’veux bien un café du coup s’il te plaît, je crois qu’on va avoir besoin de prendre des forces pour finir de monter ce truc ! Et compte sur moi, je partirai pas d’ici tant qu’il sera pas installé ! »

L’Américain détailla brièvement l’intérieur de la maison, tâchant tout de même de ne pas se montrer trop indiscret en regardant un peu partout avec insistance.

« En tout cas, tu vas avoir de quoi t’occuper un bon moment avec tous ces cartons ! Faudra surtout pas que t’hésites à me demander un coup de main si t’as besoin ! J’vis tout seul donc ça me dérange pas, ça évitera que je me retrouve à passer mon temps libre à glander sur mon canapé parfaitement monté devant Netflix ! C’est une chouette maison en tout cas, j’suis presque un peu jaloux ! »

Noah pouffa. C’était totalement faux, il adorait son appartement ! Mais il devait avouer que le cadre était super sympa par ici !

Disons qu'elle se retrouvait avec une bibliothèque plus grande que ce dont elle avait besoin. Les mesures ça n'était pas son point fort.. en vrai elle se demandait bien pourquoi sa mère avait insisté pour qu'elle en achète une alors qu'elle passait bien trop peu de temps chez elle pour accumuler de quoi la remplir. Ceci dit, Noah avait raison ! Ça servirait toujours d'une façon ou d'une autre ! Surtout si on considérait que sa technique de rangement principal consistait à empiler les choses ici ou là jusqu'à ce que celles-ci menacent de s'écrouler.

"Alors j'ai une mauvaise nouvelle : c'est bien un clic-clac. Et je te confirme que c'est très chiant à monter ! Sinon je t'aurais pas demandé... mais si ça peut te rassurer, j'ai un lit aussi ! Enfin pour le moment j'ai surtout un matelas. J'ai pas encore monté le sommier. Mais c'est pas l'urgence. Je crois. Raaah ! Tu savais toi qu'emménager quelque part ça demandait autant de démarches et de trucs à faire ?"

C'était un peu une surprise. Et c'était d'ailleurs surprenant que ça soit une surprise pour elle ! Avoir grandi dans une auberge, normalement, ça vous apprend que la vie c'est un truc complexe avec plein de corvées et de meubles à monter. Et pourtant, ça n'empêche pas qu'elle se sentait légèrement dépassée par l'emménagement. Mais hors de question l'admettre devant son collègue ! En plus, il faisait une trop bonne diversion pour qu'elle se préoccupe de tout ça. Son collègue était plutôt drôle et cette rencontre suffisait à illuminer la journée. Surtout quand elle se disait qu'ils allaient pouvoir bosser ensemble. Ça présageait des journées de boulot plus qu'endiablées !

Le deal était passé et les voilà qui marchaient tranquillement en direction de chez elle, plaisantant de concert. Franchement, la mélancolie n'avait aucune chance de survivre face à ça !

"Alors pour les Trucs à sacrifier, il faut que tu attendes au pied d'un chêne, à 23h53 très précisément, tu te mets en marche vers le nord. Si les écureuils qui habitent le chêne te jugent méritant, alors ils finissent par te guider jusqu'à leur planque à Trucs à sacrifier. En revanche, si tu ne l'es pas, ils te laissent marcher jusqu'à ce que tu tombes dans la mer ! Alors t'as plutôt intérêt à être sûr de ton coup, sinon tu vas aller prendre le thé avec les poissons."

Elle n'arrivait pas à savoir si elle n'était pas dépaysée. Un peu quand même. C'était pas les mêmes citrons ! Son nez ne pouvait pas être leurré si facilement !

"Ouaaaai ! Quitter les parents et ma région c'était déjà suffisamment dur comme ça, alors quand j'ai vu qu'il y avait une agrumeraie j'ai cherché tout partout partout pour trouver un logement dans le coin ! Au moins quand je suis déprimé j'ai juste à aller marcher au milieu des citronniers et ça va tout de suite mieux ! Je suis fille unique, je crois que mes parents en voulaient d'autre mais je leur filais assez de boulot comme ça en plus de l'auberge et de l'agrumeraie, ils ont laissé tomber l'idée ! Et toi, fils unique ? D'ailleurs t'es du coin ?"

La population de l'île était assez curieuse... il y avait presque autant de gens natifs du coin que d'immigrés. Ça faisait un drôle de brassage de cultures. Et ça pour le coup, ça lui changeait grandement de son bout de campagne italienne où quasiment personne ne venait se perdre... à part son père donc !

Ils arrivèrent finalement chez elle, et Noah put constater l'étendue des dégâts. Non, Raf n'était pas une fée du logis. Et encore moins en ce moment qu'il fallait toujours faire des choses à gauche à droite. Mais elle s'y retrouvait. La plupart du temps ! Et puis c'était pas de sa faute, la vision du canapé éclaté en pièces détachées et monté à moitié seulement participait grandement à l'ambiance de champs de bataille de la pièce. Une fois qu'il serait monté, ça irait déjà beaucoup mieux ! À la remarque de son collègue, Rafaël attrapa la notice pour la lui brandir sous le nez en guise de preuve.

"Ça tu vois c'est la moitié de canapé que j'ai déjà monté toute seule ! Mais tu vois, la notice elle dit qu'il faut être deux. J'ai voulu vérifier si elle avait raison. Figure toi que oui, elle avait raison. Impossible d'aller plus loin toute seule. So here you are !"

Elle retourna du côté de la cuisine pour s'attaquer au café. Autant elle n'était pas spécialement douée en cuisine, autant le café ça relevait de l'art pour elle. Sans doute son côté le plus italien... et puis ça lui paraissait d'autant plus important de faire ça bien que Noah avait gentiment accepté de venir l'aider dans sa pagaille. Et puis c'était ça de grandir dans une auberge, on avait le goût de recevoir les gens correctement !

"Et bien la prochaine fois on aura qu'à aller faire du vélo ensemble ! Comme ça tu pourras me montrer des coins et tout. Ou refaire des cascades. Comme tu préfères, t'as l'air d'avoir un certaine talent pour ça, tu pourras peut-être même m'apprendre ! Sinon tu prends du sucre ?"

Renchérit-elle d'un ton moqueur en revenant vers le coin salon avec les deux tasses d'un café fumant délicieusement parfumé qu'elle vint poser sur la table basse, qui, elle, était parfaitement montée. En même temps, les tables basses, c'était vraiment facile !

"La maison est vachement bien, mais j'aime pas être seule et de toute façon je tiens pas en place, alors je sais pas si je vais y passer tant de temps que ça au final. Je suis plus un courant d'air qu'une vraie habitante ! Mais au moins on s'y sent bien. Et ça sera encore mieux quand on aura vaincu ce maudit canapé ! Mouhahaha ! T'es prêt pour la prochaine étape ?"

Noah n’avait pu que rire aux mots de Rafaël, lui confirmant que oui, il savait à quel point les déménagements et emménagements étaient vraiment relous. Entre celui qui les avait menés, lui et toute sa famille, à Banchisa, puis celui de son grand-frère, puis le sien, puis celui de son cadet… Il en avait déjà fait plusieurs des déménagements ! Et ça serait bientôt le tour de sa petite-sœur !

Quoi qu’il en soit, les deux collègues quittèrent donc leur zone de rencontre pour se diriger vers la maison de Rafaël. Puis, pendant leur marche, un nouveau rire passa les lèvres de l’Américain. Noah avait toujours eu beaucoup de mal à rester sérieux quand il plaisantait. Et cette histoire de trucs à sacrifier… La nouvelle arrivante à Banchisa avait une sacrée bonne imagination, ça promettait pour leurs heures de service ensemble !

« Ah ouais ! Merde, c’est sacrément précis tout ça ! Je me le note dans un coin de ma tête, et je tâcherai de me le noter plus tard sur un post-it, merci pour les tuyaux ! Faut être bien équipé en plus… Une boussole, une lampe torche histoire d’y voir quand même un minimum en pleine nuit, un livre qui recense tous les arbres pour être sûr de pas me planter, un maillot de bain et même des gâteaux secs ! Parce que bon, si les écureuils veulent pas de moi et que je me retrouve à boire le thé avec les poissons, autant que je leur apporter un petit truc, ça se fait pas de se pointer à l’improviste chez quelqu’un les mains vides ! »

Noah avait toujours eu cette tendance à adorer les blagues et à renchérir quand on lui en faisait. Plutôt que de revenir sur une conversation plus terre à terre et sérieuse, il avait donc préféré poursuivre sur cette histoire invraisemblable.

« Haha, ouais, je vois le genre ! Perso, j’ai un grand-frère, un petit-frère et une petite-sœur, ce qui fait qu’on a longtemps été 6 à la maison, ça fait de l’animation ! Et encore, heureusement que ma petite-sœur est née… Ma mère a toujours voulu une fille et, avec mon père, ils se sont dit qu’ils en auraient vraiment une, alors si elle était pas arrivée tout de suite… Qui sait combien de frères j’aurais encore ! Donc, pour revenir à ce que tu disais, les déménagements, je connais, avec ceux de mes frères et le mien ! Enfin, en tout cas, si jamais t’es un peu déprimée et que les citrons n’arrivent pas à te remonter le moral… Hésite pas à m’appeler hein ! Il paraît que j’suis plutôt bon en remontage de moral ! »

Noah lui offrit un sourire un peu plus tendre, espérant qu’elle ferait vraiment appel à lui si ça n’allait pas. Ils se parlaient vraiment pour la toute première fois, mais il était tout bonnement hors de question qu’une de ses collègues, avec qui le feeling passait aussi bien, se retrouve avec le moral dans les chaussettes !

Les deux pompiers arrivèrent finalement à destination, et Noah put constater toute l’étendue des dégâts avec ce demi-cadavre de canapé… Se retrouvant avec la notice sous le nez, l’Américain ne put s’empêcher de rire à nouveau.

« Ah oui effectivement… On a un peu trop tendance à sous-estimer les notices, mais c’est vrai que, la plupart du temps, elles ont raison. »

Noah pouffa à sa petite pique amicale, attendant sagement que Rafaël lui prépare sa tasse de café. Il avait gardé la notice dans les mains, l’étudiant sérieusement en étant accroupi à proximité de la carcasse et des différentes pièces restantes. Il demanda un sucre à son hôte et finit par carrément s’assoir par terre, l’air franchement concentré, puis il se retourna vers la table basse avec un grand sourire quand Rafaël y déposa sa tasse.

« Merci beaucoup ! En tout cas, aucun problème pour qu’on fasse du vélo ensemble un de ces jours ! Et je t’apprendrai quelques-unes de mes cascades, j’ai bien compris que t’en mourrais d’envie ! Et je comprends, ouais… Moi aussi j’suis pas souvent chez moi. En général, quand j’ai fini de bosser ou que j’ai du temps libre, j’en profite pour faire un peu de sport ou sortir et retrouver mes potes ! D’ailleurs, je pourrai t’inviter à une de nos soirées si tu veux, tu pourrais peut-être faire de belles rencontres ! Enfin, sauf si t’aimes pas trop sortir en soirée… Ah et j’ai oublié de te répondre tout à l’heure, mais j’vivais à New York avant ! J’suis arrivé ici vers hum… Mes 12 ans j’crois. »

Noah attrapa sa tasse et vint doucement la faire s’entrechoquer avec celle de Rafaël, un grand sourire aux lèvres.

« J’suis prêt ! Je reprends des forces avec ton café qui sent juste beaucoup trop bon, et on pourra s’y mettre ! C’est tout un art de comprendre ces notices sans explications écrites ! Les gens qui font ces schémas pensent vraiment que c’est plus simple de faire comme ça ? »

Noah sirota tranquillement son café en soupirant d’aise. Un bon café, ça faisait toujours du bien ! Et ils en auraient sans doute besoin pour affronter ce foutu clic-clac et cette notice en dessins !

"Bien vu, toujours ramener un tit quelque chose à manger à ses hôtes c'est essentiel ! Les poissons seront très satisfaits de toi. À défaut d'obtenir des Trucs à Sacrifier, peut-être que tu pourras repartir avec des Bulles d'Oxygène sacré ! C'est pas donné à tout le monde ! Bon par contre il va falloir que je t'apprenne un truc ou deux si tu sais pas reconnaître un chêne... on peut pas te laisser comme ça voyons !"

Pour Rafaël qui avait passé tellement de temps dehors dans une campagne ou une autre, ça lui paraissait toujours étrange qu'on puisse ne pas être capable de différencier les arbres. Surtout que bon, un chêne c'était quand même un arbre facile à reconnaître selon elle...Mais c'était pas grave. Elle aimait bien Noah et si ça le branchait ça lui ferait plaisir de lui apprendre à reconnaître les arbres, ça ferait un bon échange de procédés s'il devait lui faire visiter l'île !

"Ha ouai ! On a genre des familles complètement opposées en fait ! Ça devait être carrément le bordel ouai. Chez nous tu sais c'est tellement petit tout le monde connaît tout le monde au final, ça te fait comme une grande famille. Et puis chez nous t'avais les touristes qui revenaient régulièrement aussi, ça te fait un peu comme une famille éloignée finalement. Ceci dit je ne manquerai pas de tester tes services de remonteur de moral, enfin m'en veux pas trop si je ne suis pas pressée de tester ! C'est pas contre toi mais la déprime c'est moyen mon truc !"

Ceci dit, c'était quand même rassurant de savoir qu'elle pourrait avoir du soutien sur l'île si le besoin s'en faisait sentir... Au moins d'un coup elle se sentait beaucoup moins isolée et ça, c'était une perspective réjouissante ! Comme quoi, à sa façon elle trouver moyen de faire son trou ici. Tout allait bien se passer !

Mais avant tout ça, il fallait venir à bout du clic-clac maudit ! Le temps qu'elle fasse le café, elle avait mis la fameuse notice dans les mains de Noah, qu'il puisse en prendre connaissance, vu qu'elle avait déjà bachoté dessus une bonne partie de la matinée.

"Mouais, c'est la notice qui m'a sous-estimée en vrai !"

Bon d'accord, vu l'état du salon c'était un peu de la mauvaise foi... et un peu le plaisir du bon mot aussi. Elle aimait bien se raconter que si elle n'était pas tombée sur son collègue, elle aurait trouvé une façon ou une autre pour monter ce maudit canapé toute seule. De toute façon, elle n'aurait pas eu le choix non ? Raf n'était pas du genre à se laisser impressionner par une notice ! En témoignait l'état du salon... elle vint s'assoir aux côtés de Noah pour déguster le café et étudier la fameuse notice (maudite).

"Mah tu m'as grillée, je suis beaucoup trop admirative de tes compétences en cascade ! Vraiment, faut que tu m'apprennes, ça me semble essentiel à ma vie. Et je suis carrément opée pour les soirées !"

Pas qu'elle en ait fait tant que ça, ni qu'elle ait l'essence d'une clubeuse, mais elle avait plutôt hâte de se refaire une vie sociale. Alors l'opportunité était beaucoup trop belle ! Surtout apportée sur un plateau comme ça... Elle pourrait toujours voir par la suite si ce genre de sorties ou de personnes lui convenait. Elle aviserait à ce moment-là ! Raf avait toujours préféré foncer dans un problème et réfléchir après. Elle n'allait quand même pas se plaindre de ne connaître personne et refuser de rencontrer des gens !

"Ça a dû sacrément te changer de décor de passer New-York à ici ! Remarque, mon père a fait à peu près la même chose en fait... Ça te manque pas du coup ?"

C'était peut-être un truc d'Américains ça en fait, de tout plaquer de leur vie agitée dans des grandes villes pour des endroits plus calmes, voire immondément calmes. Ça donnait pas envie d'aller aux États-Unis !

"Héhé, le café c'est un art de vivre là d'où je viens ! C'est l'un des premiers trucs qu'on m'a appris à faire à l'auberge ! Par contre on m'a pas appris à lire les notices. Ça doit demander un diplôme spécial !"

Le temps de siroter sa tasse, et Rafaël partait à la recherche de la pièce suivante. On pourrait très bien continuer à bavarder tout en se battant avec ce maudit meuble ! Elle parvint à extraire la pièce suivante, une immense tige, de son carton, et retrouva les vis appropriées. Il fallait que l'un d'eux tiennent la structure et la barre pille dans l'axe, tandis que l'autre vissait. Bon d'accord, elle aurait sans doute galérer toute seule... elle passa donc le paquet de vis toutes mélangées et ces espèces de clés à la con qu'il fallait utiliser pour ça...

"T'as la notice alors je te charge de retrouver la bonne vis !"

Noah aimait vraiment beaucoup cette rencontre ! Le courant passait très bien avec Rafaël, il riait beaucoup, et elle lui proposait même qu’ils se revoient en dehors du boulot pour vivre d’autres aventures ! Bon, découvrir les différentes sortes d’arbres qui existaient, c’était peut-être pas l’aventure du siècle, mais l’Américain avait comme dans l’idée que même un truc comme ça, qui s’apparentait presque à une sortie scolaire, pourrait avoir une toute autre dimension avec sa collègue !

« Avec plaisir ! Je m’en remets à toi pour m’enseigner tout ce que tu sais sur les différentes sortes d’arbres ! Je serai ton Padawan de la nature ! Et j’espère bien, moi aussi, que t’auras pas besoin tout de suite, voire même jamais, de mes services de remonteur de moral ! T’es bien plus mignonne quand tu souris ! »

Noah avait tendance à être un peu trop franc. Il trouvait Rafaël très mignonne quand elle souriait, mais il n’avait absolument pas dit ça dans l’optique de faire le joli-cœur. C’était une simple constatation ! Et puis, de toute façon… L’Américain avait toujours détesté voir les gens tristes. Sans doute que le pouvoir d’empathie de sa mère avait un peu déteint sur lui, mais quand les gens qu’il appréciait n’allaient pas bien, ça le touchait lui aussi.

Quoi qu’il en soit, le problème à présent était de réussir à vaincre ce clic-clac maudit. Notice entre les mains, Noah pouffa aux mots de Rafaël. Elle semblait d’aussi mauvaise foi que lui, c’était plutôt rigolo ! Puis, quand elle accepta de participer à certaines soirées avec ses amis et lui, l’Américain sentit son sourire se faire plus doux. Il était super content qu’elle accepte !

« Haha, pas de problèmes ! Je t’apprendrai tout ce que je sais ! Bon, par contre, si tu veux faire des cascades à vélo, on va peut-être éviter de s’amuser avec le vélo de ma mère… Je doute pas de tes compétences pour réparer un panier, mais si on finit par vraiment l’esquinter… Faudrait voir si on peut pas récupérer un vieux vélo à la caserne ! J’suis sûr qu’il doit y en avoir un qui traîne quelque part ! En tout cas, j’suis content que t’acceptes de participer à des soirées avec moi ! Tu verras, mes potes sont super sympas et on a même nos petites adresses qu’on pourra partager avec toi ! »

À la question de Rafaël, Noah leva les yeux vers le plafond, semblant réfléchir. Il finit par hausser les épaules.

« Bouaf, pas vraiment non… C’est sûr que le changement a été assez brutal, surtout que je parlais pas un pet d’italien en arrivant. Je crois que ça a été ça le plus compliqué… Mais au final, j’crois que je me sens bien plus à ma place ici qu’à New York ! Les grandes villes qui bougent tout le temps, c’est cool, mais je crois que je suis plus à l’aise dans des zones plus paisibles comme ça ! T’imagines, toi, devenir pompier à New York ? Tu dois juste jamais arrêter en fait ! Et v’là les horreurs que tu dois voir aussi… J’dis pas que c’est ultra calme ici, il se passe aussi parfois des trucs terribles, mais c’est quand même bien moins récurrent. Et le cadre est génial aussi, avec la mer et la montagne juste à côté ! »

Noah lâcha un nouveau rire aux mots de Rafaël, avant de terminer sa tasse. Il la reposa sur la table basse non loin et déplaça le paquet de vis devant lui, le fixant avec un air déterminé. Il remonta les manches de sa veste avant d’ouvrir le paquet… avec un peu trop de force. Résultat, la moitié des vis se fit joyeusement la malle dans des directions toutes différentes.

« Oops… J’pensais que ça allait être plus dur que ça à ouvrir… Bon, t’inquiètes pas, c’est qu’un léger contre-temps ! J’suis en charge de la notice et des vis, j'te décevrai pas ! »

Noah se mit donc à quatre pattes pour chercher la fameuse vis, commençant à rassembler les autres qui s’étaient éparpillées. Il mit rapidement la main dessus et jeta un dernier regard à la notice avant de passer à l’étape du montage. Il donna quelques instructions à Rafaël pour l’installation de cette tige immense, puis ils purent passer à la suite.

Le montage se passa plus ou moins bien, avec certains assemblages qui durent parfois être défaits une, voire deux ou trois fois, pour correspondre parfaitement à l’image de la notice maudite. Ça avait été un combat assez long et fastidieux, mais ils avaient finalement vaincu ! S’asseyant sur ses talons en lâchant un profond soupir, le dos de sa main passant sur son front, Noah jeta un sourire triomphant à sa voisine.

« Mission accomplie, partenaire ! C’était un adversaire vraiment coriace, bon sang, je m’attendais pas à ce que ce soit aussi compliqué ! Mais ton canapé est enfin en un seul morceau ! Ah… Ou pas… Tu crois que c’est un truc important, ça ? »

Noah s’était saisi d’une pièce assez conséquente qui traînait un peu plus loin. Sans doute que dans leur concentration extrême, ils l’avaient poussée sur le côté et l’avaient tout bonnement oubliée… L’Américain se frotta la nuque, observant la pièce en trop avec une petite moue.

« Tu testes le canapé ? C’est le tien après tout, c’est normal que ce soit toi qui te lances ! Comme ça, on verra si tout s’écroule. Si c’est le cas, ça voudra dire que cette pièce est plutôt importante. Sinon, bah… Tu pourras toujours la garder en trophée ? »

"On fera ça alors ! T'es plutôt pas mal toi aussi quand tu souris, ça fera plaisir aux écureuils un duo de sourire. Surtout que t'es sympa en plus, alors ils seront vraiment très très très contents !"

Elle n'avait pas trop réfléchi, elle s'était contentée de répondre sincèrement au compliment de Noah. De toute façon, elle avait toujours été convaincue que quand on pensait un truc gentil au sujet de quelqu'un, il fallait lui dire. C'était quand même mieux non ? C'est sûr que Noah était plutôt du genre beau gosse, les filles devaient lui tourner autour constamment. Pour elle, c'était moins de la drague qu'un fait.

Les choses allaient devoir devenir sérieuses ! Entre le café et le clic-clac, il était temps d'arrêter les bêtises ! Ou pas. Parce que ça n'avait vraiment pas l'air d'être leur point fort à tous les deux le sérieux. Preuve en est que pour le moment, ils réfléchissaient à comment Noah pourrait lui à prendre à faire des cascades à vélo, ce qui revenait à dire qu'il allait lui apprendre à se casser la gueule à vélo. Une compétence pour le moins... originale. Et un brin inutile.

"Y a des vélos qui traînent à la caserne ?? Genre on fait local de récupération aussi ? Non parce qu'on faisait ça chez moi aussi, tellement y avait d'animation. On partageait les locaux avec la recyclerie et du coup y avait des vieux vélos qu'on retapait. Et même une fois, un tracteur ! T'as déjà fait une course en tracteur d'occas ? Enfin en tout cas merci beaucoup pour l'invitation, j'avais peur de rester la nouvelle paumée indéfiniment !"

Vraiment, cette rencontre allait quand même changer la donne d'un seul coup et sur beaucoup de choses pour elle... C'était quand même un sacré coup de chance ! Et pas que pour cette histoire de canapé maudit... elle était plutôt flattée que Noah l'apprécie déjà suffisamment pour prendre le risque de la présenter à son groupe de potes. En plus ça la rassurait, ça lui permettrait de rencontrer d'autres gens... Elle avait un peu peur de se retrouver à trop coller aux basques de Noah jusqu'à l'agacer... Déjà qu'ils allaient bosser ensemble, si en plus elle venait toujours le voir en dehors, il allait finir par se fatiguer !

"J'imagine que ça doit faire un sacré changement... mais ouai j'avoue, pompier à New-York, t'as intérêt d'être opérationnel le plus vite possible ! On devrait faire un classement des villes où être pompier... Mais comment t'as fait du coup sans parler italien ???"

D'une certaine façon, elle et Noah avaient eu une trajectoire inverse. Noah était passé d'hyper agité à plus calme, elle était passée d'hyper calme à plus agité. Ceci dit, même si elle avait cherché l'animation et un endroit plus vivant, New-York, ça aurait été un peu too much d'un coup ! D'autant que niveau animation, il était temps de s'y mettre pour de vrai. Alors qu'elle rassemblait les éléments pour l'étape suivante, elle confia à Noah la charge de trier les vis... ce qu'il fit en déchirant le paquet et les déversant partout. Rafaël afficha une grimace moqueuse.

"Tu es venu m'aider à empirer la situation en fait ? Parce qu'en vrai ça j'y arrivais très bien toute seule tu sais."

C'était bien évidemment un agacement de façade puisque de toute façon c'était le genre d'accident qui arrivait forcément quand on montait ce genre de meuble. Si ça n'avait pas été lui qui avait éventré ce paquet, ça aurait sans doute été elle. Mais quand même, elle préférait que ça lui arrive à lui ! Au moins comme ça elle pouvait se moquer, c'était beaucoup plus drôle !

Le montage se passa bien. Enfin aussi bien qu'un montage de meuble en kit pouvait se passer. Raf fût obligée d'admettre qu'à deux, c'était quand même plus facile... et beaucoup plus drôle ! Au moins ça avançait pour de vrai et bientôt, ils vinrent à bout du meuble. Alors qu'ils admiraient fièrement leur oeuvre, Noah se rendit compte qu'ils avaient oublié un bout.

"Ha."

Raf reprit le plan, cherchant à quel moment ils auraient pu oublier un morceau aussi gros. Pourtant, elle était persuadée qu'ils avaient bien suivi toutes les instructions à la lettre, y compris l'instruction non officielle qui consiste à râler et insulter le meuble dans les diverses langues à disposition.

"Normalement on finit avec une vis en trop, pas avec une tige immense en trop non ?"

Qu'est-ce que c'était que cette pièce ??? Il allait falloir tester pour mieux se rendre compte de ce qui s'était passé. Et bien évidemment, elle était toute désignée pour jouer les cobayes.

"Si je ne survis pas, dis à ma mère que j'ai planqué son moulin à poivre décorée dans la vieille cuve de la distillerie, celle qu'on utilise plus parce qu'elle laisse un goût bizarre au limoncello."

Elle prit une grande respiration, théâtrale juste ce qu'il fallait, et s'assit. Tout d'abord, il n'y avait rien à constater. À première vue, tout fonctionnait comme un canapé devait fonctionner.

"Ça devait pas servir en f... AAAH PUTAIN !"

En voulant s'enfoncer plus pour s'installer plus confortablement, elle s'était retrouvée comme avalée entre les deux pans du canapé... les pièce manquante devait sans doute servir à faire la jonction entre les deux parties et éviter ainsi ce genre de soucis. Là elle se retrouvait coincée en arrière avant le dossier qui lui était retombé dessus. Elle était partagée entre râleries et rire nerveux. C'était affreusement inconfortable, et ça allait finir par être douloureux si on ne l'aidait pas à la sortir de là bientôt, mais c'était surtout tellement ridicule et absurde !

"C'était ptet un peu important quand même en fait."

Noah avait ri au compliment de Rafaël, le prenant avec tout autant de sincérité que les compliments qu’il avait pu lui faire juste avant. Personne ne savait comment les choses pourraient évoluer entre eux, mais pour l’heure, le seul lien qui semblait se tisser entre eux était une grande complicité qui allait sans doute en faire voir de toutes les couleurs à leurs collègues de la caserne !

La conversation se poursuivit ensuite avant qu’ils n’attaquent le cœur du problème : le montage du clic-clac maudit. Et inutile de dire que la perspective de faire une course de tracteurs n’eut pour effet que de faire apparaître des étoiles dans les yeux de Noah !

« Sérieux ? Waw, ça devait être carrément trop génial de faire une course de tracteurs ! J’t’avoue que j’ai jamais eu le plaisir d’en faire, j’me suis contenté de faire des courses de kart ou de vélo, mais c’est tout ! J’ai pas mon permis de conduire alors, forcément, ça limite un peu les possibilités… J’imagine que t’as déjà fait ce genre de courses toi ? Tu gagnais au moins ? Tu crois qu’on pourrait réussir à se trouver des tracteurs pour en faire ici ? »

Ouais, parce que là, l’idée lui plaisait beaucoup trop ! Découvrir de nouvelles choses, de nouvelles sensations… C’était un peu un truc qui passionnait Noah ! C’était sans doute aussi pour ça que la transition entre New York et Banchisa, quoi que difficile à cause de la barrière de la langue, n’avait pas eu de gros impact sur le moral de l’Américain. Il avait été triste de quitter son chez lui et ses quelques amis, bien sûr, mais c’était une toute nouvelle aventure qui lui avait tendu les bras !

« C’est ça ! Et d’avoir le cœur super bien accroché aussi ! Et je crois qu’on va surtout devoir se faire une liste de tous nos projets, histoire de pas finir par en oublier ! Pour la langue, j’suis allé dans une école internationale au début, donc tous mes cours étaient en anglais, le temps que je me familiarise avec la langue. Mon père parlait déjà couramment italien et comme ma mère est espagnole, elle a été un peu aidée avec les similarités qui existent entre les deux langues, comme moi et mes frères d’ailleurs vu qu’on parle espagnol depuis tout petit ! »

Le moment vint ensuite de s’attaquer au montage du canapé. Enfin, c’était ce qui était prévu avant que Noah n’envoie joyeusement valser la moitié des vis du sachet que Rafaël lui avait tendu. À sa remarque, l’Américain retint un pouffement de justesse, préférant afficher une fausse moue innocente et désolée.

« Pardon Rafaël… Mais c’est quand même plus rigolo quand on ajoute un peu de challenge non ? Bon, pour le coup, j’ai vraiment pas fait exprès, j’pensais que le plastique allait m’opposer un peu plus de résistance mais… Bah non. T’inquiètes pas, c’est qu’un petit contretemps. On va le monter ce canapé, foi de Noah ! »

Le montage se fit dans la même bonne ambiance et les rires, malgré quelques moments plus sérieux et de prises de tête pour réussir à comprendre cette foutue notice. Ils arrivèrent toutefois à leurs fins, Noah jetant un regard fier à leur œuvre… Jusqu’à ce que ses yeux tombent sur une pièce qu’ils avaient visiblement oublier d’installer… C’était certain que l’habituelle vis qui n’allait nulle part avait une toute autre dimension avec eux ! Mais le meilleur moyen de savoir si cette pièce était vraiment importante ou non, restait encore de tester le canapé ! Rafaël fut donc le cobaye tout désigné pour cette expérience, ses derniers mots tirant un rire à Noah.

« Okay, je prends note ! J’omettrai intentionnellement les circonstances pour les moins tragiques de l’accident qui t’auras coûté la vie. Tu préfères que je dise que tu n’as pas survécu à un combat face à un monstre marin géant ? C’est quand même un peu plus classe que de mourir en se faisant manger par un clic-clac maudit, non ? »

Enfin, Noah disait ça pour rire, il espérait quand même que ce test n’allait pas entraîner la moindre blessure à Rafaël !

Celle-ci prit donc place sur le canapé. Si tout semblait aller pour le mieux au début, quand la jeune femme voulut s’installer un peu plus confortablement, le drame survint : Rafaël se fit littéralement engloutir par le canapé ! Noah fut surpris par son cri soudain et la fermeture brusque du meuble sur sa collègue, puis, la surprise passant, il se mit à rire vraiment franchement, les larmes aux yeux en voyant la position de Rafaël, à moitié disparue dans le canapé.

« On dirait oui ! Désolé, vraiment ! J’m’y attendais pas, c’était une belle attaque surprise de sa part ! T’inquiètes pas, j’vais te sortir de là avant qu’il finisse par vraiment te digérer ! »

Noah eut quand même bien du mal à s’arrêter de rire alors qu’il se levait et exerçait suffisamment de force sur le dossier du canapé pour le relever et permettre à Rafaël de se sortir de là. Chose faite, il laissa le meuble se replier sur lui-même, essuyant ses petites larmes de rire d’un revers de la main.

« Désolé, c’était vraiment beaucoup trop drôle ! Mais j’espère que tu t’es pas fait mal au moins… Pour la prochaine tentative, ça sera moi le cobaye ! »

Mais pour l’heure, il fallait reprendre cette notice et voir où cette pièce maudite se plaçait ! Ils y étaient presque !

Rafaël afficha un sourire fier.

"Évidemment que je gagnais ! Tu as devant toi la championne invaincue du canton de Monta Isola mouhahaha ! Je te botte les fesses quand tu veux. Par contre tu as conscience que c'est toi qui es du coin, donc à toi de me dire si on peut trouver des tracteurs dans le coin. Sinon je serai obligée de te foutre dans ma valise la prochaine fois que je rends visite à mes parents !"

En vrai il n'y aurait sans doute pas besoin de cacher Noah dans ses valises, après tout c'était une auberge, on avait l'habitude d'y voir du monde ! Mais elle se doutait que le côté voyage en mode espion caché emballerait son nouveau collègue au moins autant que la perspective de la course de tracteurs. Et elle pouvait le comprendre ! Les courses de tracteur c'était de sacrés bons souvenirs, d'autant plus qu'il fallait effectivement pas se faire gauler ! Ça rajoutait au fun du truc. D'autant que c'est pas forcément facile de faire une course de tracteur discrètement...

"Mais tu parles trois langues alors ! C'est trop cool !"

Raf était clairement admirative. Alors qu'elle-même parlait deux langues depuis son plus jeune âge... mais depuis, elle n'avait pas vraiment appris une nouvelle langue. On avait bien essayé de lui apprendre le français au collège et au lycée, mais elle n'était pas l'élève la plus douée (ce qui s'expliquait sans doute par le fait qu'elle n'était pas la plus attentive non plus), et les profs étaient en général peu intéressants (ce qui expliquait peut-être le point précédent). Si bien qu'elle n'avait jamais réellement donné une chance à cette langue voisine de la sienne. Peut-être qu'il faudrait qu'elle réessaie un de ces jours...

"Du coup toi aussi t'étais bilingue avant de savoir lire en fait ?"

Ça faisait un drôle de point de commun, mais ça amusait drôlement Rafaël, autant que ça l'enthousiasmait. De là d'où elle venait, avoir des parents de nationalités et langues différentes, c'était franchement exceptionnel. Pour ne pas dire qu'elle passait limite pour une licorne quand elle se lançait à parler en anglais à même pas 6 ans. Et personne ne comprenait pourquoi un Américain avait décidé de s'installer là... ça lui avait valu quelques remarques à l'occasion, mais ça n'avait jamais été le genre de choses qui avait pu l'impressionner. Quand un gamin tentait de la charrier là-dessus, elle se mettait à parler anglais avec un air mystérieux, ce qui lui donnait une allure de sorcière en train de jeter une malédiction, là où elle récitait simplement les histoires que son père lui racontait.

Une fois les vis ramassées suite à la trop grande force de Noah, qui avait clairement impressionné ce paquet de vis, ils se mirent donc à monter le meuble en lui-même. Sans trop de difficultés. Enfin un niveau normal de difficulté quand il s'agit de monter des meubles en kit. Et comme de bien entendu, à la fin, ils se retrouvèrent avec une pièce en trop. le truc, c'est que ce n'était pas comme d'habitude. D'habitude on se retrouvait avec une vis en trop. Mais comme Noah avait déjà dû envoyer la vis en trop à l'autre bout de la maison, ils se retrouvaient carrément avec une énorme pièce dont l'inutilité semblait déjà moins probable. Il allait falloir tester !

"C'est ça ! Dis lui que je suis morte en étant partie affronter un kraken ! De toute façon y a longtemps qu'elle se doute que je vais finir comme ça, elle a dû le voir venir où jsais pas quoi !"

Ce qui n'était qu'à moitié une blague puisque Rafaël s'était toujours amusée à faire apparaître des T-rex n'importe où pour voir comment les animaux réagiraient, ce qui avait collé quelques frayeurs à ses parents. Alors mourir en affronter un kraken... ça leur paraîtrait logique ! Parce que finir avalée par un clic-clac, c'était quand même beaucoup moins classe... et pourtant beaucoup plus vraisemblable ! Le canapé se referma sur elle. Ce qui les firent tous les deux, même si pour le coup, la douleur sourde qui commençait à lui ramper dans la jambe.

"Je veux bien accorder la victoire à mon ennemi s'il accepte de me laisser respirer ! Sors moi de là !"

Elle était toujours aussi amusée, mais la position n'était franchement pas confortable du tout du tout ! Et ça n'allait certainement pas s'arranger... Noah réussit à écarter la machoire du monstre de sorte que Raf put ramper hors de la carcasse du canapé en lâchant un soupir de soulagement, avant de se remettre à rire tout en se mâchant la jambe.

"Tu vois faut pas faire confiance aux notices ! C'était pas marqué ça dessus. J'aurais dû me déguiser en tonneau, je suis sûre que ça aurait beaucoup mieux marché ! Ou alors on répare rien et on en fait une attraction. Genre on lui colle des dents de crocodile et on fait faire des safaris aux gens !"

En attendant, il allait falloir redémonter le tout pour trouver où allait la pièce de trop et ainsi réparer leurs bêtises. Noah étudiait déjà la notice, Raf se releva pour venir regarder par dessus son bras à quelle étape ils s'étaient trompés...

"Tu la reconnais cette foutue pièce ? Je crois que c'est ça. Tu vois ça doit tenir le ressors. Genre pour éviter que ça se referme. Faut qu'on démonte une partie. Ou alors I stick to my crocodile idea. Franchement un crocodile dans le salon c'est 'achtement plus cool qu'un clic clac !"

Noah pouffa et s’inclina aux mots de Rafaël concernant ses prouesses sur un tracteur.

« Okay, je m’incline bien bas devant la championne que tu es. Du coup, avant de me botter les fesses, va falloir que tu me files quelques tuyaux hein, parce que j’suis du genre gros novice, j’ai jamais chevauché de tracteur jusqu’à maintenant ! En tout cas, compte sur moi, je vais tâcher de me renseigner ! Enfin, je dois avouer que ça ne me dérangerait pas de faire cette petite course directement dans ton patelin… Ça fait un bail que j’suis pas parti en voyage ! »

La conversation se poursuivit ensuite sur leurs compétences en langues, Noah hochant vivement la tête avec un grand sourire. Il n’avait jamais été l’élève le plus brillant de sa classe, mais il ressentait une certaine fierté quant à sa facilité à s’exprimer dans ces 3 langues qu’étaient l’anglais, l’espagnol et l’italien.

« C’est ça ! Je parle trois langues, dont deux depuis que je suis tout petit ! Mais attends… Comment ça « moi aussi » ? Ça veut dire que t’es bilingue aussi ? Mince, moi qui pensais être un genre d’animal rare… »

Noah pouffa à nouveau avant que les choses sérieuses ne commencent avec le montage de ce clic-clac de l’enfer.

Les deux collègues s’en sortirent plutôt bien, jusqu’à ce qu’ils en viennent à constater qu’il leur restait une pièce dans les mains. Sauf que là, contrairement à ce qu’on avait l’habitude de voir, on était assez loin de la petite vis en trop ! Là, c’était un autre niveau, la pièce était carrément énorme ! Ils décidèrent alors qu’il n’y avait plus qu’un seul moyen de vérifier si cette pièce était si indispensable que ça : essayer de s’assoir sur le meuble de l’enfer ! Ce fut Rafaël qui s’y colla et qui… se fit littéralement manger par le clic-clac affamé ! Noah n’avait vraiment pas pu réprimer ce fou rire en la voyant ainsi repliée en deux, se précipitant tout de même pour la sortir des mâchoires du canapé, histoire qu’elle ne finisse pas par se faire vraiment mal.

« C’est clair ! On devrait envoyer un mail ou un courrier pour râler qu’on ne nous présente pas tous les dangers du montage d’un meuble sur une notice ! Pour le coup du déguisement… J’t’avoue que je sais pas si ça aurait bien fonctionné, mais tu sais quoi ? Comme pour la pièce en trop, moi j’dis, y’a qu’une façon de le savoir : essayer ! Et puis, je dois avouer que j’ai toujours rêvé de me déguiser en tonneau. Genre… Tu crois qu’on me calculerait vraiment pas si je me mettais dans un coin de rue avec un déguisement comme ça ? »

Encore une idée débile qu’ils se lançaient comme un défi, idée au moins aussi saugrenue que celle de Rafaël de faire de son canapé une attraction. Noah explosa d’ailleurs de rire en imaginant la scène.

« Sérieux, c’est la meilleure idée de la journée ! Ah j’en peux plus, mes abdos sont en train de décéder je crois ! »

Il fallut plusieurs secondes à Noah pour réussir à retrouver son calme, histoire de se repencher sur la fameuse notice et trouver l’étape qu’ils avaient merdé.

« Franchement, tu mets une protection en tissu vert sur ton clic-clac, tu couds des dents et des yeux, et ça peut faire un sacré attrape-touristes ! Genre tu mets ça au niveau de la gare, j’suis sûr que tu te ferais pas mal d’argent ! Comme ça, tu pourras t’acheter un autre clic-clac avec tous les sous que t’auras mis de côté ! Le problème, c’est qu’en attendant, ça va t’obliger à dormir ailleurs que sur ton clic-clac si tu veux pas finir étouffée dans ton sommeil par ce meuble de l’enfer… »

Noah était vraiment enchanté à cette idée de faire du canapé une attraction à Banchisa, mais il ne voulait pas que ça en sacrifie pour autant le confort de sa collègue. Alors tant pis pour cette autre idée géniale !

L’Américain se repencha donc sérieusement sur la notice, afin de trouver l’endroit où cette pièce allait.

« Okay, ça devrait pas être trop compliqué, on s’est planté sur la fin, donc on aura pas besoin de tout redéfaire… En tout cas, j’espère que t’auras encore de l’énergie après tout ça. Oublie pas qu’on doit réparer le panier de mon vélo ! »

Noah lui offrit un grand sourire, croisant quand même bien fort les doigts pour qu’elle ne se désiste pas au dernier moment. Il comptait vraiment sur elle pour lui sauver la mise auprès de ses parents ! Enfin, en attendant, les deux pompiers se remirent au travail et parvinrent enfin à se débarrasser de cette grosse pièce.

« Bon ! L’heure de vérité ! On a visiblement plus aucune pièce en trop, ce qui, je te l’accorde, n’est pas forcément bon signe vu qu’il reste toujours un truc à la fin normalement… Et comme tu t’es déjà fait manger tout à l’heure, c’est à mon tour ! »

Noah inspira profondément, faisant mine de se donner du courage pour sauter le pas, et il se mit en position de la chaise au-dessus du canapé en pliant ses genoux, visiblement pas très rassuré à l’idée de poser ses fesses dessus. Il hésita quelques secondes, avant de fermer fort les yeux au contact de ses fesses sur le clic-clac. Il attendit un instant, le souffle coupé, avant de finalement entrouvrir un œil avec un sourire victorieux.

« Hey ! Je crois qu’on a réussi ! On l’a vaincu ! Viens t’assoir toi aussi, qu’on soit fixé ! Non parce que bon, le canapé a l’air de te trouver à son goût, il a peut-être juste pas envie de me manger moi si je suis tout seul ! »

Rafaël hocha la tête avec un air sérieux. Pas de soucis, elle apprendrait à Noah à conduire un tracteur ! Et puis après elle lui botterait les fesses à la course ! Ça promettait d'être un bon moment ça aussi. Puis ça lui ferait une raison pour retourner chez ses parents, qui verraient d'un drôle d'oeil qu'elle revienne pour ce genre de fanfaronnerie, mais ne seraient même pas surpris.

"Bah si t'es un animal rare, moi aussi en fait ! Enfin en tout cas dans mon patelin c'était rare, genre.. y avait que moi quoi. Ça relevait même plus de l'anomalie que de la rareté. Ma mère est italienne mais mon père est américain. Il est venu en vacances et il est jamais reparti. Du coup je parlais anglais et italien avant de savoir écrire mon nom. Mais c'est le genre de situations sans doute beaucoup plus fréquentes à Banchisa !"

La population de la ville était bien plus variée que le continent. Sans doute le fait d'être sur l'autoroute des pingouins. Les sorcières se rassemblaient ensemble des pays alentour, forcément, ça brassait du monde !

"Par contre j'étais pas assez motivée à l'école pour une troisième langue... je dois avoir quelques restes de français, mais il faudrait que je m'y remette plus sérieusement. Un jour où je m'ennuierai !"

Mais qui sait quand une telle chose allait arriver... En plus il faut bien avouer que sans une motivation particulière, elle se voyait mal s'assoir à une table pour apprendre une langue juste comme ça pour le plaisir... De toute façon, avant d'aller réciter du Molière en français dans le texte, elle avait un canapé à monter, une pièce en trop à oublier, le montage final à tester, finir coincée dans le dit canapé, avant d'enfin être extirpée du canapé en question par son partenaire du jour. Et faire quelques plans sur la comète aussi tant qu'à faire. Raf éclate de rire suite à cette nouvelle proposition...

"Moi je dis qu'il faut faire l'expérience ! Pour la science. Tu te déguises en tonneau, et moi je me cache en face, genre derrière une arbre, j'observe et je prends des notes sur le comportement des gens autour de cet étrange tonneau abandonné ! Peut-être même qu'après on pourrait interroger les gens pour savoir quel était leur sentiment face à ce tonneau. Ce serait classe !"

Enfin Noah finirait peut-être par avoir les jambes engourdies...et le dos tout courbaturé... mais il fallait bien consentir à quelques sacrifices au nom de la science ! Après tout, elle venait bien de se sacrifier pour tester le canapé alors c'était un peu chacun son tour non ? Parlant du canapé, Raf n'avait pas dit son dernier mot ! Après une attaque aussi lâche, franchement on était en droit de s'attendre à un retour sur investissement non ? Elle crut un instant que Noah allait se pisser dessus à force de rire. Ce serait un autre problème ! Encore qu'elle était tellement contente d'avoir retrouvé un compagnon de bêtise que finalement elle ne lui en voudrait pas trop longtemps.

"Han ouai ! Je pourrai me faire une armée de clic-clac crocodiles ! Des clicodiles ! Je vais être la reine de Banchisa à la tête de mon armée de clicodiles mouhahaha ! Si tu veux je te ferai général ! Et t'inquiète, je t'ai dit, j'ai un vrai lit. Donc on peut s'offrir une armée de clicodiles."

Pour un mot qui n'existait pas quelques secondes plus tôt, ça en faisait des clicodiles... En même temps ça claquait sur la langue, c'était plutôt agréable !

"T'inquiète, ton panier est toujours au programme !"

Un deal était un deal, et Rafaël n'était pas du genre à revenir sur sa parole. En plus, c'était pas comme si c'était un bricolage insurmontable ! Normalement, ça devrait vite être résolu ! C'était quand même plus facile que ce foutu clic-clac... d'autant plus que cette fois, Noah se portait volontaire pour tester le meuble. Un tel courage devait être récompensé ! Elle posa sa main sur l'épaule de son collègue avec un air compatissant.

"Ton courage ne sera pas vain, sois en sûr."

N'empêche qu'elle appréhendait quand même un peu. Et s'ils s'étaient encore plantés ? Franchement ça ne la gênait pas d'être restée coincée dedans, mais ça serait quand même con que Noah soit bloqué dans son canapé par leur incompétence ! Elle l'imita et retint elle aussi sa respiration eeeeeeet... rien ! Le canapé resta en place ! Après quelques secondes, il était toujours confortablement installé et tout semblait aller pour le mieux. Aussi ne se fit-elle pas prier pour le rejoindre avec enthousiasme. Pour le coup, elle ne fit pas trop attention à la distance, ne s'émouvant pas spécialement de s'être installée si proche de lui.

"Alors à première vue le canapé est rassasié ! On a réussi, on a vaincu ! Félicitation camarade et merci !"

Raf prit un temps pour s'affaler sur le canapé, histoire de se remettre de ses émotions. Mais il ne fallait pas oublier l'autre partie du deal.

"Alors, il est où ton panier de vélo ? Qu'on lui règle son compte ! Je sors la caisse à outil et je te répare ça fissa !"

Noah n’avait pas pu retenir un petit sourire attendri en entendant Rafaël lui parler de la rencontre de ses parents. C’était vraiment trop mignon… L’Américain avait déjà été en couple quelques fois, mais il ne se souvenait pas avoir déjà eu un coup de foudre aussi violent, qui aurait pu le pousser à tout quitter pour quelqu’un… Peut-être qu’un jour, ça finirait par arriver. Non, en fait, il espérait vraiment que ça lui arrive… Noah devait avoir un petit côté fleur bleue tout au fond de lui !

« Ouais, je vois ! Ça fait un peu comme mes parents, ils se sont rencontrés et se sont plus jamais quittés après ça ! Enfin, j’imagine que pour les tiens, ça s’est sans doute passé un peu moins violemment… J’crois que ma mère l’a traité de connard et a promis de lui crever les yeux avant de décider de rester avec lui… »

Noah fronça les sourcils. Ses parents étaient vraiment bizarres quand on y pensait, à se chamailler presque tout le temps alors qu’ils s’aimaient aussi fort… L’Américain se gratta la tête, un peu dans ses pensées, se demandant si à lui aussi il lui faudrait quelqu’un avec autant de caractère…

« Oh, crois-moi, maintenant que j’suis dans les parages, tu trouveras jamais le temps de t’ennuyer ! Et puis, au pire, on kidnappera un Français qui traîne dans le coin et on le forcera à nous suivre dans nos aventures épiques pour apprendre avec lui ! Ça sera bien plus amusant comme ça que de te poser devant un bouquin ! »

Après tout, il devait bien y avoir quelques français dans cette ville, non ?

Et puisqu’ils en étaient (encore) à évoquer des idées pourries pour ces fameuses futures aventures, Noah se joignit à Rafaël pour éclater de rire. Non, vraiment, ils n’allaient pas avoir assez de toute une vie pour réussir à cocher toutes les cases de leur To Do List !

« ALLEZ ! On se fera ça ! Surtout que oui, si on nous dit que c’est une idée débile, on pourra effectivement leur démontrer que c’est comme une expérience scientifique ! Peut-être même qu’on pourra revendre notre étude et nos résultats à des chercheurs ! On va devenir riches Raf’, c’est moi qui te le dis ! »

Et vu le sujet qui suivit, il était presque normal de se demander si ces deux énergumènes pouvaient réussir à être sérieux deux secondes… Noah n’en pouvait plus de rire autant !

« Ah ouais, la Reine, carrément ! Mais écoute, ça me va d’être le général. Je pourrai guider notre armée pour qu’on conquiert l’île et après on pourra envisager les choses à une échelle plus grande en s’exportant sur le continent ! D’abord l’Italie, puis l’Europe, puis le monde, puis l’univers, puis la galaxie tout entière ! »

Noah avait pris une pose de fier conquérant, le visage sérieux et tourné vers un horizon lointain caché par le plafond de la pièce, les poings fermés sur ses hanches et un pied surélevé qu’il avait posé sur le carton le plus proche, sans trop appuyer dessus juste au cas où il contiendrait des objets fragiles.

Quoi qu’il en soit l’heure n’était plus aux rêves de conquête, mais bien au test de leur nouvelle tentative de montage de canapé ! Noah prit un air grave et feinta d’avoir du mal à déglutir quand Rafaël posa sa main sur son épaule, puis il se lança, s’asseyant en retenant son souffle, anticipant un peu un claquage de mâchoire de canapé inopiné en restant sur ses appuis.

Quelques secondes passèrent alors, chacun retenant son souffle, avant que Noah ne laisse éclater sa joie en voyant qu’ils avaient visiblement réussi. Un grand sourire étira ses lèvres quand Rafaël le rejoignit, puis il lui tendit son poing serré afin qu’ils puissent checker à leur victoire.

« On est vraiment trop fort en fait ! Si jamais on finit par arrêter notre carrière de pompiers, j’suis presque sûr qu’on pourra se reconvertir en monteurs de meubles professionnels ! Félicitations à toi aussi du coup, et y’a pas de quoi ! C’était un plaisir de te filer un coup de main, surtout qu’on s’est bien marré ! »

Et ça, c’était sans doute la chose la plus importante !

Noah imita ensuite son hôte en se laissant retomber lourdement contre le dossier du canapé, avant de vivement se lever à la question de sa voisine.

« Ah, ouais, j’vais te le chercher ! On fait ça ici ou tu préfères éviter de trop titiller ton clic-clac ? Enfin, j’me dis qu’on sera peut-être un peu mieux dehors après toutes ces émotions à l’intérieur ! »

Et puis, vraiment, Noah préférait être à l’extérieur dès qu’il le pouvait. Rester enfermé dans une maison, très peu pour lui !

Il prit donc les devants, attendant que Rafaël récupère sa caisse à outils, se plantant devant le vélo de sa mère pour en retirer le panier. Il le fixa avec un air un peu triste, comme s’il s’agissait d’un petit animal blessé, avant de le tendre à sa camarade.

« Voilà la victime… Je m’en remets à toi pour réussir à le remettre… sur pieds ? Enfin, en état quoi ! Et j’vais en profiter pour bien t’observer, parce que je pense que des compétences en bricolage pourraient vraiment m’être utiles ! »

Raf ne put s'empêcher de rire en entendant l'histoire de la rencontre des parents de Noah.

"Drôle de départ en effet ! Et ils sont toujours ensemble ? Pas le même style de mon côté. Mon père a commencé par prolonger son séjour, encore, et encore, et encore, jusqu'à que finalement ma mère juge absurde qu'il loue une chambre à l'auberge... encore que, je suis même pas sûre qu'il y ait eu un moment où ils s'en sont rendus ! presque sûre qu'à un moment ils se sont rendus compte que papa avait pas payé sa note depuis des mois, ce qui posait plus de problème vu que toute façon il retapait les meubles..."

Difficile de savoir lequel de son père ou de sa mère était le plus à l'arrache... la bonne nouvelle c'est qu'ils ne l'étaient pas dans les mêmes domaines, ça permettait de compenser et rattraper un peu les choses ! Sinon, sûr que l'entreprise familial serait allée dans le mur il y a bien longtemps...

"Du coup pour kidnapper un Français, on met un bout de fromage devant une caisse ouverte, et quand il prend le fromage POUF la caisse lui retombe dessus et il est prisonnier ! Et nous voilà avec un Français tout frais pour s'amuser !"

Suffisait juste de trouver le fromage. Et une caisse assez grande. Et un peu de temps pour assembler le tout. Rien d'insurmontable donc. Le seul obstacle, ce serait peut-être le temps pour faire tout ça. Puisque apparemment, une idée débile ne se mettait sur le côté que pour laisser la place à une autre... Tant de plans géniaux à mettre en place et si peu de temps pour les réaliser !

"Une vraie fortune ouai ! Le monde n'attend que ça qu'on fasse cette étude, il l'ignore, mais il en a besoin ! Heureusement qu'on est là quand même !"

Bon c'était mal connaître le milieu de la recherche... mais nul doute qu'ils arriveraient sans doute tirer de cette pseudo expérience quelque chose qui aurait presque l'air scientifique ! Et puis si effectivement ils devenaient riches, ce serait bien plus pratique pour financer leurs armées de clicodiles !

"OUAAAI ! le monde est à nous cher général ! Je compte sur toi ! Ensemble nous allons créer un monde plus drôle ! Et comme on aura appris le français grâce à notre prisonnier, on pourra envahir la France sans trop de soucis."

Pas dit qu'il soit plus juste, mais en tout cas, il serait plus drôle. Surtout que maintenant qu'ils étaient venus à bout de ce terrible clic-clac, ils n'allaient quand même pas se laisser impressionner par le monde. Franchement, avec une équipe pareille, le monde n'avait qu'à bien se tenir... à commencer par la caserne d'ailleurs. À ce rythme, le reste de l'équipe allait les prendre en grippe tant ils pouvaient s'avérer insupportables ensemble ! Ils allaient vraiment être impossibles à tenir... Rafaël cogna son poing sur celui de Noah, petit check de la victoire, hochant simplement la tête en souriant. Pas dit qu'elle ait envie d'abandonner son métier actuel pour aller monter des meubles, même avec Noah, mais après tout c'était toujours sympa de savoir qu'ils avaient un plan B.

"Monteurs de meubles c'est un bon plan B si jamais on rate notre conquête du monde ! Enfin en attendant général, il te faut une monture digne de ce nom ! Allons réparer ton fier destrier ! On aura plus de place dehors... d'autant que je ne suis pas sûre de pouvoir réparer un vélo attaqué par un clicodile ! Donc ne le provoquons pas trop ! Il reste de nombreuses choses à découvrir sur cette étrange espèce..."

Raf partir récupérer sa boîte à outils avant de rejoindre Noah dehors. Elle attrapa le guidon du vélo, donna un coup d'élan pour le mettre debout sur sa roue arrière avant de le mettre sur le "dos". Le vélo se retrouvait ainsi à l'envers, en appui sur sa selle et le guidon. Comme ça, il ne bougerait pas ! Petite fouille à la recherche du tournevis correspondant, un peu d'huile de coude, et voilà le panier déboulonné ! Ça allait être beaucoup plus facile de le réparer maintenant qu'elle y avait facilement accès. Le retournant pour l'observer sous toutes les coutures, elle constata que le panier était tout sauf très solide... les mailles étaient assez fines, pas étonnant qu'il se soit tordu dans la chute ! La bonne nouvelle c'était que seule quelques mailles semblaient cassées, les autres étaient simplement tordues. Si elle y allait doucement, elle pourrait redonner sa forme au panier sans trop de soucis ! Elle récupéra le marteau dans la boîte à outil, posa le panier par terre, et appliqua une légère pression pour que les mailles déformées reprennent leur forme initiale. Une fois fait, elle tendit le panier réparé à Noah pour qu'il puisse en juger.

"Ça te va ? Si tu veux je peux essayer de ressouder les endroits qui sont cassés mais j'ai peur que ça se voit plus... si on plan c'est de passer inaperçu c'est pas top... Ceci dit ce genre d'équipement n'est pas fait pour faire des cascades voyons ! Laisse moi deviner, tu n'as pas lu la notice d'utilisation de ce panier avant de partir faire le malin dans les chemins !"

« Toujours ouais ! Je crois que le plus incroyable, c’est de voir que même si le temps passe, ils continuent à s’engueuler ou à se faire des crasses, mais continuent aussi à s’aimer de plus en plus… J’sais pas si on peut dire que c’est le couple idéal à prendre en modèle, parce que, perso, j’me passerais bien de toutes ces scènes une fois casé, mais ils sont un modèle à leur manière ! En tout cas, c’est amusant de comparer leur rencontre à celle de tes parents ! Leur histoire est trop mignonne ! »

Noah affichait un sourire un peu plus tendre. Il n’avait pas forcément envie de se caser là, tout de suite, maintenant, mais il espérait vraiment qu’un jour il pourrait trouver quelqu’un avec qui il pourrait passer du temps au quotidien et partager tout un tas de choses. Fonder une famille était aussi dans ses projets d’avenir. Mais pour l’heure, il y avait mieux à faire : élaborer un plan pour kidnapper un Français !

« Bonne idée le coup du fromage ! Mais, histoire d’être sûrs que notre plan ne foirera pas, je propose de mettre une baguette de pain, juste à côté du fromage ! Après, peut-être que ça pourrait être une bonne idée que je me planque dans mon fameux tonneau, que je me pose dans un endroit assez fréquenté, avec l’appât sur le couvercle ! Comme ça, si y’en a un qui s’approche, plutôt que de lui faire tomber une caisse vide dessus, c’est moi qui lui tomberai dessus ! »

Non, vraiment, il fallait que Rafaël et Noah arrêtent avec leurs plans débiles… Parce que c’était bien beau de juste évoquer l’idée, comme ça, pour s’amuser, mais l’Américain avait VRAIMENT envie de mettre tous ces plans à exécution !

Noah n’arrêtait pas de rire à chaque plan foireux qui surgissait dès qu’ils ouvraient la bouche, mais Rafaël avait raison : maintenant qu’ils en avaient fini avec leur mission première, celle de mettre sur pieds ce tout premier clicodile, il leur fallait à présent s’occuper de leur deuxième mission ! L’Américain sortit donc de la maison et attendit sagement sa collègue près de son vélo, soupirant un peu en se frottant la nuque en constatant le sale état du panier qui se trouvait à l’avant de celui-ci. Rafaël le rejoignit bien vite et, après avoir fait faire une magnifique pirouette à son fidèle destrier, la demoiselle décrocha le panier pour s’en occuper. Quand elle eut terminé, Noah l’attrapa avec toute la délicatesse du monde, l’approchant de son visage pour le détailler en plissant les yeux.

« Hum… Ouais, j’pense que là, j’vais pouvoir À PEU PRÈS réussir à passer incognito ! Du coup, on va laisser tomber les soudures et… J’vais rentrer comme ça ! Au pire, si jamais je sens que mes parents sont un peu suspicieux, j’irai directement en acheter un autre ! J’pense pas que ma mère y tenait tout particulièrement à ce panier de toute façon ! »

Noah redonna le panier à Rafaël afin qu’elle puisse le remettre en place, le tout avec un grand sourire aux lèvres.

« Merci beaucoup en tout cas ! Tu t’en rends pas compte, mais tu m’as très certainement sauvé la vie ! Par contre, si ça te gêne pas, j’vais te laisser le remettre en place… J’suis pas très délicat, j’risquerais de tout défoncer et j’veux pas foutre en l’air ton travail de pro ! En tout cas, j’te fais la promesse que, la prochaine fois, je lirai plus attentivement la notice avant de me lancer dans une descente sur une piste de cross ! »

Noah prit un air sérieux et posa son poing fermé contre son cœur, histoire de sceller cette promesse qu’il venait de faire à Rafaël. Puis, au moment où il s’écartait pour laisser la demoiselle terminer sa mission, son portable sonna. Un peu surpris, l’Américain s’empressa de regarder son smartphone, avant de lâcher un petit grognement.

« Bon bah… On dirait que le moment fatidique est arrivé plus vite que prévu… Ma mère vient de m’envoyer un message pour que je lui rapporte mon fidèle destrier et, juste au cas où, j’pense que c’est plutôt une bonne idée d’éviter de la faire attendre, histoire que son courroux soit moins violent si elle remarque quoi que ce soit ! Encore merci pour ton aide, et désolé de partir aussi précipitamment ! Tu me laisses ton numéro du coup ? Comme ça, j’t’appellerai pour la prochaine soirée que je ferai ! Et j’en profiterai aussi pour te faire un compte-rendu d’ici une heure ou deux, pour que tu saches comment mon retour à la maison se sera passé ! »

Noah n’avait plus qu’à attendre que Rafaël lui laisse son numéro, puis il pourrait repartir vers le domicile familial. En tout cas, une chose était sûre : il allait conduire plus prudemment que jamais sur le chemin du retour !

C'est vrai que les histoires de leurs parents étaient à l'opposé l'une et l'autre ! C'était rigolo quand on comparait. Et en même temps, c'était attendrissant. Parce que ça montrait aussi qu'on pouvait prendre plein de chemins différents pour créer une belle histoire, et que même ce terme enveloppait plusieurs définitions possibles ! Elle avait beau ne pas être une grande fleur bleue, elle trouvait cette idée plutôt chouette et rassurante. La vie offrait finalement des tas et des tas de possibilités !

Enfin en attendant les deux zozos étaient trop occupés à mettre au point des plans tous plus alambiqués les uns que les autres... cette fois, la conversation les avait poussé à trouver un moyen de kidnapper un Français, justement histoire d'apprendre cette langue. Raf avait proposé une première bouture du plan que Noah s'était empressé de compléter.

"Ha parfait ! T'as raison, faut le rentabiliser ce tonneau ! Enfin au rythme où on va tu vas finir par emménager dedans. Je dirais que c'est à la fois mega cool parce que comme ça tu vas pouvoir jouer les petits escargots et déplacer ta maison partout où tu veux ! Mais de l'autre c'est quand même un peu triste parce que tu pourras pas avoir de clicodile dans ta maison quoi. Sinon je valide ce plan !"

C'était pas tout de dire des bêtises, mais il était temps de réparer le fameux vélo ! Plus précisément le panier du vélo. Mine de rien, Rafaël était vraiment contente de se livrer à ce genre de petits bricolages. Elle en faisait beaucoup à l'auberge de ses parents, si bien qu'aujourd'hui elle était capable de réparer tout et n'importe quoi et qu'elle appréciait vraiment ce type d'activité. Elle était donc ravie de pouvoir rendre service à Noah ! Une fois validé ses réparations, il était temps de le remettre en place, enfin une fois que son éclat de rire serait passé !

"Et t'y penses que maintenant au fait de changer le panier ? Ou alors tu lui dis que si elle veut je peux lui faire des jolies soudures customisées et tout ! Genre on peut lui faire un panier ultra design. Jte jure, la soudure c'est magique... faudra juste que tu me préviennes que je puisse retrouver le fer à souder dans son carton. Je peux lui faire des flammes, des tites fleurs, et même des T-rex !"

Dit-elle en lui envoyant un clin d'oeil. Parce que les T-rex c'était quand même beaucoup trop cool alors il ne faut jamais rater une occasion d'en mettre le plus possible partout ! Mais bon il valait mieux obtenir l'accord de la maman avant... déjà que si elle était capable de lui faire la tête au carré pour un panier de vélo tout simple abîmé, alors un panier de vélo customisé, même avec de glorieux dinosaures, il risquait d'en entendre parler longtemps !

"Haha, c'est pas souvent qu'on a sa vie suspendue à un panier de vélo ! Au moins pour une fois c'était simple de sauver la vie de quelqu'un. Mais t'inquiète, j'aime bien ce genre de bricolage, je trouve ça relaxant. Mais lire la notice de ton prochain vélo t'éviterait sans doute de faire un soleil. Y a des notices aussi exprès pour apprendre ce genre de trucs ! Y a des notices pour presque tout..."

Une fois le panier remis en place, Rafaël se releva et remit le vélo debout avant de le tendre à Noah.

"Et bah ça tombe bien, il est comme neuf ! Et ouai, t'as intérêt de me dire comment ça se passe. Et vraiment n'hésite pas, si une customisation peut t'éviter le pire, je serais ravie de te venir en aide. Tu n'imagines pas ce qu'on peut faire avec du fil de plomb et un fer à souder ! En tout cas c'était bien marrant comme sauvetage, en plus maintenant j'ai même un canapé et le début d'une armée de clicodiles ! Mais la prochaine fois on pourra juste se capter au boulot ou pour boire un verre, évite les pirouettes !"

Une fois les numéros échangés, elle salua joyeusement de la main Noah qui repartait sur son fidèle destrier. Ça avait été un très chouette moment, ils avaient bien ri, et en plus elle se sentait un peu moins seule ! Pour le coup, ça lui avait donné suffisamment d'énergie pour vider... oh au moins deux cartons !